LES MARQUISES SONT EXQUISES…
Le premier peuple qui s’établit dans les îles du Pacifique vient d’Insulinde et de Chine. Donc de l’ouest.
L’Océan Pacifique que nous sillonnons aujourd’hui avec l’aide des alizés, ils l’ont sillonné eux aussi sur de très grandes pirogues, contre les vents, contre les courants et contre la houle. Ils ont rallié des îles qui se situent à plus de 13 000 kilomètres de leur terre d’origine, sans carte, sans autre repère qu’un chemin d’étoiles, sans autre compas que le soleil, sans autre possibilité de calcul des longitudes que l’estimation des distances lunaires.
Aucun peuple ne s’est établi aussi loin de ses racines en voyageant par la mer, partant plein est contre le vent espérant trouver là-bas de nouveaux territoires. Les premiers s’élancèrent il y a plus de 30 000 ans. A l’arrivée des premiers européens, leur territoire s’étend dans un triangle dont les sommets sont Hawaii, l’île de Pâques et la Nouvelle-Zélande. Tous les archipels compris entre ces trois points ont été conquis par ces Austronésiens, les Maohis, et ce, sur un océan qui occupe 40 % de la surface totale de la planète. Attention, ne confondez pas les Maohis et les Maoris de Nouvelle Zélande. Les premiers sont les ancêtres des seconds. Leur nom se compose de « Ma » qui signifie « pur, propre, digne » et de « Ohi », ou « rejetons qui fait des racines». Donc, le Maohi est un homme libre qui a su se réimplanter en gardant ses racines. (Jean-Jo Scemla-Le voyage en Polynésie)
40ans après Jacques Brel, jour pour jour, après 21 jours de mer, nous entrons dans la baie de Tahauku (la baie des traîtres) à Hiva Oa, aux Marquises.
Ces îles mythiques s’offrent à nous, majestueuses, grandioses, se dressant fièrement face à l’Océan Pacifique. Après trois semaines de navigation, le cœur encore un peu en mer, légèrement enivrés, grisés d’océan, parfaitement heureux, nous avons l’humble sensation de mériter de fouler cette terre marquisienne dont nous avons tant rêvé durant cette traversée.
Les parfums de la terre viennent à notre rencontre, et finissent de nous enivrer : humus, mangues, tiaré, vétiver, ylang-ylang.
En abordant l’île de HivaOa, des images s’emparent à nouveau de nos esprits. Samuel Wallis, Bougainvillier, James Cook, Fletcher Christian ..
Comment décrire les Marquises pour ceux qui n’ont jamais foulé la «Terre des Hommes: Fenua Enata»?
Ce qui nous a séduit dans ces îles c’est tout d’abord l’accueil chaleureux et la générosité des marquisiens. Leurs sourires prévenants, respectueux, rassurants. Ils nous ont souvent offert de quoi manger pour plusieurs jours sans même nous connaître, ou invité à partager nos vies, nos récits respectifs autour d’une partie de pétanque ou de pêche. L’accueil du voyageur est ici un devoir et un plaisir, partout où nous sommes allés, c’est d’abord un sourire, puis « Kaoha… Mavemai » : bonjour, bienvenue.
La joie de vivre! Chacun a sa place aux marquises et y est reconnu. Comme par exemple Kalino (tahitien adopté mais plus marquisien que les marquisiens) est un sculpteur sur os connu des navigateurs, mais c’est aussi un musicien et chanteur qui ne raterait pas une bringue !
Chacun a plus d’une corde à son arc et si le travail manque, il y a toujours le coprah. Activité (très physique) qui consiste à aller entretenir la cocoteraie et collecter les cocos, les ouvrir et mettre la chair a sécher. La récolte est ensuite acheminée par cargo vers Tahiti pour fabriquer le célèbre Monoï aux milles parfums de fleurs.
Les marquisiens sont très attachés à leur terre, le « Fenua Enata » (ou Henua Enana: la terre des hommes) héritée de leur ancêtres et conservée par la famille. Cette terre est le territoire de chasse (cochon ou chèvre) et de culture : banane, fruit à pain, mangue, avocat, corossol, papaye, goyave, pamplemousse (aussi délicieux qu’abondant), ignames, fafa,, noix de coco etc…
Elle inspire les sculpteurs, graveurs, tatoueurs, danseurs et musiciens qui perpétuent la culture marquisienne. Alors à votre tour aussi de l’aborder avec le respect qu’il se doit, de ne pas abuser de sa générosité ni de celle de ses habitants.
Cette culture Maohi, cette identité Marquisiene, avait d’abord été enfouie et presque oubliée après le passage des Européens et des missionnaires qui pendant plusieurs générations ont imposé le christianisme, leurs mœurs et leurs coutumes. Depuis quelques décennies, un retour en force de la culture, grâce aux souvenirs des anciens, aux académiciens marquisiens et au festival des îles des Marquises : Matavaa, a permis de redonner aux marquisiens la fierté de leur patrimoine culturel et archéologique.
Nous avons eu la chance d’arriver peu avant le Matavaa de HivaOa, et d’assister à ces rencontres culturelles entre les différents archipels. Danses, cérémonies, artisanat et cuisines locales ont étés au programme pendant plusieurs semaines car nous avons pu assister aux répétitions sur quelques îles. Cette année encore nous avons pu savourer le superbe Matavaa sur l’île de UaPou ! Innoubliable.
L’archipel comprend 2 groupes d’îles au Sud et au Nord, séparés par une journée de navigation parfois trop vive, parfois trop calme. La diversité des mouillages permet de choisir en fonction des vents et de la houle omniprésente. Chaque île a son propre caractère et sa fierté, alors même si les conditions de mouillage ne sont pas toujours parfaites, nous, c’est décidé, on y retournera encore et encore!!!