24 décembre nous quittons La Gomera aux Canaries à l’heure de la sieste par un temps plutôt clément…
Mais bientôt la houle se forme, le vent se lève et nous propulse telle une fusée vers le Cap-Vert que nous atteindrons en à peine 5 jours (au lieux des 7-8 jours prévus).
Nous avons fêté notre réveillon de Noël en plein océan au large du Sahara, à 150 miles des Canaries, par un vent de 25 noeuds, des creux de seulement 2 mètres mais une houle très hachée… pas toujours facile de garder sa part de bûche au chocolat dans son assiette, ou de garder son assiette tout court…
Heureusement le Père Noël à tout de même réussi à nous trouver pendant le quart de nuit d’Olivier et le moral de l’équipage est au beau fixe après tous ces beaux cadeaux.
25 décembre. Pendant mon quart de nuit je repense à notre dernière escale, Les Canaries.
Loin d’être un paradis de la plaisance, de très rares mouillages forains, peu de marinas et des navigations musclées, j’ai tout de même été surprise par la diversité de cet archipel bien que peut-être un peu déçue par son manque d’exotisme.
Lanzarote avec ses paysages volcaniques étonnants, m’a époustouflée par sa manifestation de forces de la nature. La terre vie, règne et l’homme y survit docilement.
Au contraire de Ténériffe, où l’homme occupe le terrain par des champs de culture sous serre (quand c’est possible) et des champs d’immeubles sur presque toute la côte. C’est étrange d’arriver après de si longs jours de navigation si loin de l’Europe, si près de l’Afrique et pourtant d’avoir l’impression de débarquer en Espagne à nouveau. A tel point qu’à Ténerife je me suis parfois demandée si nous avions fait le voyage dans le bon sens.
Mais le beau temps, le ciel bleu, une douce chaleur de fin d’été en plein mois de décembre me rappellent vite que l’Afrique n’est vraiment pas loin.
Ténerife nous a également offert une rencontre inoubliable avec un banc de baleines globicéphales, par une mer d’huile sans vent, le bateau à l’arrêt.
Au grand bonheur des enfants, nous avons pu les voir de très très près, entendre leurs souffles, les cris des petits appelant leur mère et autre phénomène étrange qui comme l’ont fait si bien remarqué Noé et Camille, ressemblait à de fortes flatulences. Ces beaux pets marins n’ont pas manqué de faire beaucoup rire nos moussaillons.
Anne nous à quitté aux Canaries, heureuse de son séjour parmi nous elle nous à laissé au mouillage des Cristianos, nos coeurs gros nous lui disons à bientôt. Je ne me fais pas à ces ‘au revoir’.
Deux jours plus tard, c’est Odile (une amie à Anne) qui vient nous rejoindre pour partager notre aventure jusqu’au Cap-Vert. Les enfants sont contents de voir une tête nouvelle et adopte Odile en quelques minutes. Bientôt elle sera baptisée Didi par Camille.
Nous partons alors à La Gomera, notre dernière escale avant la traversée vers le Cap-vert. L’île est plus sauvage, moins construite, préservée du sur-développement touristique, elle nous séduit et nous enchante vite. Alors nous y restons un peu plus longtemps que prévu, nous imprégnant de la vraie nature des Canaries, sauvage, rude et douce à la fois.
La houle et le vent qui forcissent me tire de ma rêverie nocturne. Le bateau devient nerveux, les vagues déferlent, on fait du 10 noeuds avec des pointes à 11 noeuds et de beaux surfs à 13 noeuds.. A l’intérieur, les vagues tapent et font trembler tout le bateau. Ca siffle, ça grince, ça cogne! Je descends dans les cabines jeter un oeil aux enfants qui dorment paisiblement. L’état de la mer, le vent régulier et l’absence totale de bateaux rendent les quarts de nuits plus faciles. 1h du matin, Olivier vient me relever de mon quart. Je me couche et malgré la fatigue je mets du temps à m’endormir. J’ai pas l’habitude de dormir dans de telles conditions. C’est un peu comme si on vous demandait de dormir en plein tour de manège de fêtes foraines. Vous savez celui qui vous secoue dans tous les sens, fait un bruit tonitruant mais avec en plus la conscience qu’à tout moment ça peut casser. Ou presque…
26 décembre
Les enfants vivent plutôt bien les navigations. Le premier soir ils furent un peu barbouillés, comme nous tous mais ça n’a pas duré et maintenant ils jouent dans le carré qu’ils ont transformé en cabane, sans ce soucier de voir ou non la terre, ou la mer. Seul Camille n’aime pas les grosses vagues lorsqu’elles tapent sous la table et renverse son repas.
Il n’y a que moi qui semble dérouiller avec ce fichu mal de mer. Légèrement barbouillée mais avec des maux de tête violents à s’en arracher les yeux. Plus d’énergie, envie de rien sauf de dormir et dormir encore. Mais lorsque enfin je peux m’allonger je n’arrive pas à trouver le sommeil qui me permet d’échapper le temps d’un rêve à cette souffrance. J’aimerais aller mieux, pouvoir faire des activités avec les enfants sans immédiatement avoir le crâne qui explose. Heureusement il ne pleut plus comme au début du voyage, je peux donc sortir, prendre la barre, surveiller les voiles et le vent.
Le vent, de Nord-Est hier semble doucement vouloir passer à l’Est. Bientôt peut-être ce sera le vent du désert, de la Mauritanie? Plus chaud enfin?
Toujours aucun bateau en vue… nous sommes seuls sur l’eau.
Nuit du 26 décembre.
Le vent fort et régulier qui nous fait dévorer les miles à toute allure, le ciel couvert sans étoile et la fiabilité du pilote automatique rendraient les quarts de nuit presque ennuyeux… Mais grâce au baladeur qu’Odile nous a si gentiment offert, je peux écouter des romans lus ou des émissions de radios passionnantes. Mais je ne peux pas en abuser non plus, car ces enregistrements m’emportent parfois trop loin de notre bateau.
Les maux de têtes ne me quittent pas, il va falloir vivre avec … l’inconvénient de ce mal de mer c’est qu’il me donne parfois trop envie de dormir, alors mes quarts de nuits deviennent un bras de fer contre le sommeil. Mais jusqu’à maintenant je gagne toujours la partie.
28 décembre: Vive le Mercalm!
Je lui vaux de ne pas avoir sauté par dessus bord!
Hier fut pour moi une journée noire. Je ne peux même pas vous raconter ce que les autres membres de l’équipage ont fait, je ne m’en souviens pas. Je croyais que ma tête allait exploser de douleur, mes oreilles me faisaient mal et chaque vague tapant sur la coque me traversait, transperçait mon corps, mes os comme une onde de choc. Des idées noires insidieusement m’envahissaient. Après le repas de midi, je sors sur le pont, pour fixer l’horizon, surveiller le bateau et soudain c’est la crise. Je ne tiens plus sur ce bateau, je n’en peux plus de ce tour de manège infernal, je veux descendre, je veux que ça s’arrête. Heureusement j’ai le réflexe de m’éloigner du bord et d’aller me coucher dans ma cabine. Mais là, allongée sur mon lit je redoute la prochaine vague qui me fait trembler de douleur. Me voyant dans cet état semi conscient Olivier trouve une solution moins radicale que celle de me voir sauter par dessus bord et me fait avaler 2 cachetons de Mercalm que lui donne Odile. Rassurée de sa présence je m’endors, le cauchemar s’arrête enfin. Après 5h d’un profond sommeil réparateur, j’arrive à me relever, reprendre une vie à bord presque normalement. J’ai fini la traversée au Mercalm, ce qui m’a permis de moins souffrir, être plus sociable et tenir mes quarts de nuits plus sereinement, sans risquer de sauter en cours de route. 😉
Matin du 29 décembre, nous arrivons au Cap-Vert. L’île de Sao Nicolau n’est qu’à 3 miles mais nous ne la voyons toujours pas tellement la brume est épaisse. Nous mouillons à Tarrafal malgré la houle et surtout le vent en rafale qui souffle dans la baie.
Evidemment les photos ont été faites 4 jours plus tard, dès que le temps s’est calmé.